04.02.2019 ESSAIS // NAVY YARD
Vue plongeante sur la vénus d’argent du radiateur. À la radio une Melody fait chavirer la voiture de trottoirs en trottoirs et la nuit s’enfonce dans ce qu’il lui reste de coeur. La douleur pue le vieux bourbon sec avalé en séries noires. Peu avant, il avait été embarqué par deux bonhommes le ramenant à la réalité d’un premier trottoir sur lequel, les mains au sol il avait dessiné son visage tatoué de souvenirs auxquels ses fers le rappelaient à ses larmes.
Il a conduit à travers les gouttes de pluies qui se meurent sur un horizon vitré et qui se transforment en danseuses que la morale l’interdit d’ignorer sur l’expressway de Bushwick qui roule trop vite en direction de ce qui ne sera plus qu’un souvenir.
Je vois encore l’uppercut qui atteint le menton de ce gars qui de tout son corps s’envole au ralenti, la grâce d’un ange, pour retomber de tout son poids sur le tapis d’un ring trop ambitieux pour sa catégorie. M’avait-il confié la veille.
La musique rajoute aux drames, au fer rouge, l’odeur du manque. La radio reprend d’un froid glacial, un tube berlinois nasillard qu’elle chantait quand elle avait envie de lui rappeler ce que Walter lui avait promis.
Sur la rambarde de Navy Yard, le torse à poil, les pieds déjà bleus, tout peu encore se jouer, il suffirait que sa main se pose sur sa nuque pour lever la nuit et ouvrir les yeux sur les champs dans lequel hier encore ils s’embrassaient.
On a retrouvé la vénus d’argent dans sa main avec écris sur son torse la légende de celle qu’on appelait Verticordia. A la radio une femme faisait tinter le métal de son zip...
Affaire classée.
Nicolas Ambrosetti, NYC, 2019
20.03.2019 ESSAIS // TENIR
Tenir, tenir encore et ne rien laisser transparaitre. Nous ne sommes souvent pas conscients de la résilience que nous avons. Comment continuer ? Comment encore espérer entretenir ce quotidien sur lequel désormais on avance en talons sur un fil qui promet un lendemain incertain. Pourquoi continuer ? Pourquoi vouloir tenir ?
Depuis le mois de février. Cela faisait plus de cent quatre vingt huit jours.
Avec du recul, au début tout semblait insurmontable, mais plus les jours ou les mois avancent plus cela devient dur. Si je devais choisir je signerai pour les premiers jours. Tenir...
Garder la tête haute. Ne rien laisser sortir. Accepter les invitations, les dîners, les sorties, les cinémas, les week-end, répondre au téléphone, trouver des réponses aux questions de plus en plus embarrassantes. L’absence intéresse beaucoup trop de monde. N’ont-ils rien à faire de leur présence. Aussi désuète et sans fonds, plus j’y pense et plus il me semble que de jouer le jeu est plus facile de devoir l’envisager quand, il me semble à être le seul à en connaître les règles.
Ils sont satisfaits. Ils semblent biens. Tout va bien. Les enfants, leurs métiers, leurs amis, leurs voyages, tout est vécu sans catastrophe. On parle du climat, de la politique locale et celle de mondes dont, pour la plupart, on ne sait même pas où cela se situe. Sans même en connaître l’Histoire. Et des séries.
Chacun a décoré son intérieur sans goût. Chacun collectionne tel ou telle artiste branchée du moment. L’exotisme des nouveaux venus occasionne des dîners et des sorties ou de grandes amitiés. Les maîtresses des uns déjeunent avec l’épouse des autres et les maris cocus se gaussent d’avoir enfin reçu après des mois de retard leur nouvel ambassadeur quatre quatre appuyant enfin le poste acquis à coup de meetings tardifs. Les enfants rivalisent à distance à travers leurs écrans et leurs parents se plaignent des tarifs exorbitants des remontées mécaniques.
Tenir... Tenir jusqu’à ce que sa lettre arrive. Ne rien savoir jusque là, ne rien laisser transparaître. Ne pas devoir justifier. Attendre que ses mots expliquent son geste. Quel courage. Quel claque. Pour le moment je dis qu’elle reviendra, qu’elle avait des affaires de famille urgentes à régler à l’étranger. Dans son pays.
Quand enfin la lettre fut arrivée, qu’elle expliquait son départ en exprimant qu’elle n’avait jamais eu d’ambition à recevoir, que mon quatre quatre et son amant, le mari de son amie bijoutière, qui lui enseignait l’art, avait été une erreur, que ce huit-clos dans lequel nous vivions l’avait suicidée, je n’ai rien dis.
J’ai fais mine de ne rien comprendre et de me rallier au moment du dessert aux arguments de mes convives, certains disaient que c’était une folle, bipolaire, manipulatrice et égoïste. Qui n’avait rien compris et qui un jour regrettera amèrement d’être partie ainsi sans rien dire. Et puis enfin on pouvait reparler des séries.
Tenir...
Nicolas Ambrosetti, GVA, 2019
02.02.2019 ESSAIS // PARIS XIème
Cela faisait deux ans qu’ils avaient emménagés dans ce studio au dernier étage d’un immeuble du XIème.
Elle avait tout fait pour le soutenir. Ce matin, sans avertissement et discussion possible, il lui avait dit que la vie de famille, le mariage, les projets communs, tout ce dont il avait parlé, ce n’était pas pour lui et que sa carrière artistique n’envisageait rien d’autre que de retourner au plus vite dans la grande capitale de l’art, là où tout se crée, se décide et se joue, à Genève, en Suisse.
Là où la vie te saisis d’une urgence créative et dans laquelle chaque artiste rêvait d’y être un jour reconnu parmi l’élite. Là où seul il était possible de pouvoir espérer qu’on reconnaisse l’expression sincère d’un travail né de ses trippes. Il avait pris un sac et avait quitté le studio sans un mot, il ne donna jamais plus de nouvelles.
Quelques jours plus tard, dans l’atelier de Chris, son meilleur ami, un sud-coréen décorateur, assise à choisir des tissus pour des cloisons pivotantes, elle avait dit:
- J’ai entendu un mec chanter ce matin à la radio en sortant du métro « Imagine qu’il n’y a pas de paradis, pas d’enfer sous nos pieds, seul le ciel au dessus de nos têtes, et que les gens vivraient dans le présent...» Tu crois que c’est facile si on essaye ?
- Ce type est un mytho. Encore un mec sans amis sur Insta, sans image, sans tatouages, un mec qui vit dans l’illusion d’y arriver seul et qui finira seul avec son balluchon de rêves. Laisse tomber.
Elle n’avait rien répondu.
Elle avait remis ses écouteurs sur ses oreilles,
Ray LaMontagne, lui, chantait:
”Well the truth it fell so heavy
Like a hammer through the room
That I could choose another over him”
Nicolas Ambrosetti, PARIS, 2019
21.09.2019 ESSAIS // LA COUPOLE
Assis à la table, jouxtant la mienne, celle au centre de la Coupole, le vin a coulé sur les nappes, et il s’engage une conversation sur la vie, l’art, les femmes, l’absurde et chacun alors partage ses convictions. Autour de la table sept convives. L’ambiance est chaleureuse, chacun se respecte et sans jugement hâtif, je pense que ces hommes s’apprécient. J’ai un peu d’avance, la femme avec qui je dîne a du retard. Madame Ferroruvido, sort d’une pièce basée sur le rasoir d’Ockham, pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple... Afin de faire passer le temps, je note alors leurs propos utopiques, en me disant qu’un jour j’en ferai certainement une oeuvre.
Tu sais Alberto, « Bientôt, le silence sera passé à la légende. L’homme a tourné le dos au silence. Jour après jour, il invente des machines et des dispositifs qui augmentent le bruit et détournent l’humanité de l’essence de la vie, de la contemplation et de la méditation »
Selon moi, dit Georges, - « Le progrès en art ne consiste pas à étendre ses limites, mais à les mieux connaître »
Ce à quoi, le prénommé Jérôme, ajoute : - « Les autres cherchent à peindre les hommes tels qu’ils apparaissent vus du dehors; celui-ci a l’audace de les peindre tels qu’ils sont, au-dedans »
Je suis d’accord mais, - “Au moment où nous concevons le concevable, il commence à résonner en nous et devient inconcevable.”
Il faut dire que , dit Alberto - “Les moyens de développer l’intelligence ont augmenté le nombre des imbéciles.”
Avec un accent distinct, le type arrivé en dernier, dont le prénom est mal prononcé par ses convives, lance: - «Pour approcher le spirituel en art, on fera usage aussi peu que possible de la réalité, parce que la réalité est opposée au spirituel!»
Marcel, toi qui a voyagé - « Tout n’est qu’apparence, non ?
En levant son verre, Marcel répond: « Plus la critique est hostile, plus l’artiste devrait être encouragé. En le reposant, il ajoute: - Le grand ennemi de l’art, c’est le bon goût. »
A table: Jean Arp, Alberto Giacometti, Marcel Duchamp, Alberto Picabia, Jérôme Bosch, Georges Braque, Piet Mondrian.
Nicolas Ambrosetti, PARIS, 2019
05.10.2017 ESSAIS // ALESSANDRINI
A six heures du matin, la queue du Berghain semblait interminable. Durant deux heures, sans aucun bruit, on attendait, en ligne allemande, timidement le regard que Sven porterait sur votre âme. Personne ne sait à l’avance qui entre ou pas. Il venait d’avoir dix-huit ans. Il venait du sud, ce sud dans lequel les mots les plus insipides prennent une autre allure. Ce sud qui rend les hommes un peu plus enfants et à dix-huit ans, le soleil de sa promenade l’obligeait trop souvent de devoir sortir ses papiers d’identités pour garantir que son visage avait bel et bien connu tous ces étés. Il était seul. Encore plus seul qu’avant. La semaine dernière, à la veille de la fin de l’année, avant les résultats du bac, il avait enfin pu leur dire, devant la classe entière qu’il aimait les garçons et qu’il avait dans la foulée réussi son diplôme. Il l’avait dit avec une telle assurance qu’il ne pouvait y a avoir aucun doute quant au soulagement que cela lui avait procuré. Alors cette entrée dans ce temple, dans lequel les questions ne se pensent plus, où la différence s’embrasse d’une compassion désuète, où on peut être tout sauf porteur de quelconque étiquette. Le temple du soi, serait, le temps d’une nuit, la scène de sa plus heureuse nature. Il fallait entrer.
Ce week-end à Berlin, un cadeau de sa maman. Qui n’avait jamais cessé de l’appeler par son prénom. Un prénom corse, qui durant les vacances sur l’île, était souvent prononcé au féminin, par ces locaux chez qui le respect passait par la taille du pantalon, du nombre de gamines sifflées et pour couronner le tout un scooter pétaradant avant qu’un jour on remplace le pot d’échappement par un instrument long rifle symbole d’une terre insoumise dirigée par des hommes, des vrais.
Avant son départ, sa mère l’avait serré si fort dans ses bras, comme si, dans son instinct, la seule chose qu’elle puisse désormais espérer sur le chemin de son indépendante solitude, qu’un garçon lui demande un jour de porter son prénom.
Le regard de Sven avait, plus que pour d’autres impatients transis de froid, alors un peu plus de poids. On n’entre pas au Berghain par hasard. Il le savait. A sept-heure trente, juste avant de passer au scan du physionomiste, on lui tendit une main.
- Hi my name is Alex, what is your name?
- Just call me by your name and make it last forever.
Sven avait ouvert la porte, ils ne se sont plus jamais quittés. Et si en une nuit seulement on pouvait tous une fois ouvrir cette porte qui donne aux chanceux, l’espoir de ne plus s’enraciner dans nos certitudes absurdes et réductrices...
Nicolas Ambrosetti, BERLIN, 2017
08.11.2016 ESSAIS // SAN GIMIGNANO
Ils étaient là, assis sur un banc, face à l’église, entourant le père. La mère tenait sa main, la fille et le cousin habillés de noir, se serraient à ses côtés.
J’étais assis juste derrière, témoin de cette famille qui sans mots, regardait le soleil passer derrière les tours du village. La toscane se sent.
La terre fait naître des odeurs qui rassérènent et quand le soir les clochers sonnent, la paix vient un peu plus qu’ailleurs vous saluer. La douceur du soir sur une place de village en Italie est unique.
Les hirondelles se rafraichissent d’arbres en arbres et les figuiers, les jasmins et le romarin partagent enfin leurs odeurs précieusement gardées secrètes toute la journée.
Lui, il pensait à cette vie, à ces moments quand la famille se réunit, il touchait celle qui avait été fidèle à ses colères toute sa vie et partagé ses peurs. Elle lui avait donné un fils, peut-être deux, il n’était pas là celui-là. Il avait quitté le village pour être assistant dans la mode à Milan. Le curé me l’avait dit. Il préférait les garçons paraît-il.
Elle, encore une fois semblait respecter son silence en complice habituée. Des fois il faut savoir se taire, quand on est une femme en Italie. Il avait certainement mis son plus beau costume.
On le saluait et conscient de son âge, des jours qui avaient passés sur ces terres, rien désormais ne pourrait plus l’arracher à son banc qui regarde l’église.
Il avait enterré son dernier frère cette après-midi d’été.
Nicolas Ambrosetti, TOSCANE, 2016
14.02.2015 ESSAIS // LAXFORD - SCOTLAND
A cette époque de l’année, les côtes de Laxford, au nord-est de l’Ecosse sont désertes et les pubs en fin d’après-midi sentent l’homme, la mer et la bière. Alors quand une femme, italienne, pousse la porte en grelotant, il me semble inutile de dire que jusqu’à ce que la porte se referme, qu’il n’y a soudainement plus un bruit et les regards, tous rivés sur ma jupe détrempée, font l’écho d’une cloche de cathédrale sur ma peau devenue rouge.
Je m’y attendais, mais je ne suis pas certaine d’y avoir été préparée.
S’ajoute désormais à cette odeur, celle de ces mains venues m’aider à enlever mon trench. Qui au passage en frôlant ma nuque, rapproche encore l’homme qui allait m’offrir un grog. Ce grog, j’en suis désormais certaine, qui l’autorisa à m’accompagner jusqu’à ma chambre plus tard.
J’avais quitté Milan le matin même. Dix ans à être mère, dix ans à l’attendre le soir rentrer tard et mettre ma vie entre parenthèse. Peut-être les dix plus heureuses années de ma vie, peut-être les plus malheureuses. Au début Morandi et Dalla chantaient avant de dîner, la fashion week me donnait la possibilité grâce à mon poste de rédactrice en cheffe d’un magazine international de nous faufiler dans les plus exclusifs after show, la biennale ramenaient très souvent nos amis vivant à l’étranger et Milan offrait régulièrement de belles expositions ou prétextes à «festeggiare» hors d’un nid, certes ravissant, mais qui depuis était devenu synonyme de routine. Sans oublier de dire que Dalla était mort depuis.
Quant à lui, à présent, il me disait je t’aime comme on commande «l’aqua e il pane».
Ce matin, sans réfléchir j’avais foncé à l’aéroport. Les vols bon marchés proposaient toutes les destinations. J’ai choisi Edinbourg. J’ai loué une voiture et j’ai roulé. Roulé jusqu’à ce que je franchisse la porte de ce pub et que mes joues réalisent que j’étais en Ecosse. Celle qui existe dans les livres. Il était grand, barbu, n’avait certainement jamais quitté son port et comme dans les pages de mes livres, il ne m’avait rien dit. Il m’avait juste accompagné à ma chambre et embrassé avant que je puisse tourner la clé.
En repartant, j’ai pu voir dans son regard, les chansons de Dalla, sur ses mains sentir l’odeur du safran de mon risotto, et sur ses joues, les couchers de soleils rouges qui n’existent qu’en Italie.
Avant de m’endormir, j’ai écris à Giaccomo, «ti voglio bene, sono gia al letto, ti scrivo domani, torno giovedi» et lui ai dis d’embrasser Mona et Lucio.
Depuis mon retour je préparerai mes Linguine aux vongole avec derrière le mur de ma cuisine, les mers d’Ecosse, un ciel gris, la pluie et les embruns, regardant filer au loin, un bateau sur lequel un marin écouterai «Sei io fossi un angelo...»
Come pofondo il mare.
Nicolas Ambrosetti, EDINBURGH, 2015
14.08.2014 ESSAIS // ZABARDAST PIETROSINI !
En Parsi, on aime penser que la magie du mot signifie: meirveilleux. Dans la vallée de Massoud, au fond du Panchir, j’avais retrouvé les visages des hommes avant la guerre. Le temps avait un peu passé et assis à siroter le thé, je les regardais qui enfin avaient les yeux sur les montagnes et les couchers de soleils que seules ces crêtes afghanes proposent aux hommes de paix.
Je pensais à cette histoire douloureuse qu’un type m’avait racontée une semaine plus tôt dans le bus qui partait de Peshawar pour le Karakorum. Il partait en repérage pour le Broad Peek et moi je filais gagner mes vallées tant aimées. On avait échangé durant le trajet nos histoires. Nous partions tous deux en grandes échapées belles de nos civilités européennes souvent pesantes. Chacun sa destination, mais le même grand large.
Pour revenir à son histoire, l’homme, de bonne famille américano-suédoise, travaillait dans la finance, avait donné deux garçons à une femme qu’il avait connu durant sa jeunesse et retrouvée en voyage. S’était marié et avait comme tout bon bourgeois, acheté une villa en campagne. Son projet dura deux ou trois ans avant qu’un jour se souvenir, que lui aussi, malgré ses engagements avait été un de ces mecs aux grands horizons, qui avait voyagé et rêvé des hommes libres et capables de lui rappeler à tout instant sa nature profonde. Le voyage ne vous quitte plus. On triche beaucoup plus mal avec sa réelle nature après le voyage.
Il avait alors pris conscience qu’il n’avait rien à faire de ce postiche de bonheur auquel il aavit voulu croire. Anaphylaxie à sa vie.
Vie de compensation au désir absent. Cette déléctation du morose dans lequel certain se complètent il n’en voulut plus. Avec certainement plus délégance il l’expliqua à sa femme et s’en alla de cette geole devenue irréspirable. On dit aisément qu’il aurait fallu y penser avant, mais cela reste une expression de comptoir. Qui de nous tous l’eut fait ?
Elle lui intredit la visite de ses fils, l’accusa de violence à leur égard, d’alcolisme et de dépendance psychotrope, se vengea comme elle put.
Nicolas Ambrosetti, PESHAWAR, 2014
TEXT // THE REVOLUTION WILL NOT BE TELEVISED
You will not be able to stay home, brother, You will not be able to plug in, turn on and drop out, You will not be able to lose yourself on skag and skip, Skip out for beer during commercials, Because the revolution will not be televised, The revolution will not be brought to you by Xerox, In 4 parts without commercial interruption, The revolution will not show you pictures of Nixon, Blowing a bugle and leading a charge by John Mitchell General Abrams and Spiro Agnew to eat, Hog maws confiscated from a Harlem sanctuary.
The revolution will not be televised
The revolution will be brought to you by the Schaefer Award Theatre and will not star Natalie Wood and Steve McQueen or Bullwinkle and Julia, The revolution will not give your mouth sex appeal, The revolution will not get rid of the nubs, The revolution will not make you look five pounds, Thinner, because The revolution will not be televised, Brother, There will be no pictures of you and Willie Mays, Pushing that cart down the block on the dead run, Or trying to slide that color television into a stolen ambulance, NBC will not predict the winner at 8:32or the count from 29 districts,
The revolution will not be televised
There will be no pictures of pigs shooting down, Brothers in the instant replay
There will be no pictures of young being, Run out of Harlem on a rail with a brand new process, There will be no slow motion or still life of Roy Wilkens strolling through Watts in a red, black and Green liberation jumpsuit that he had been saving, For just the right occasion, Green Acres, The Beverly Hillbillies, and Hooterville Junction will no longer be so damned relevant and Women will not care if Dick finally gets down with Jane on Search for Tomorrow because Black people will be in the street looking for a brighter day
The revolution will not be televised
There will be no highlights on the eleven o’clock News and no pictures of hairy armed women Liberationists and Jackie Onassis blowing her nose, The theme song will not be written by Jim Webb, Francis Scott Key nor sung by Glen Campbell, Tom Jones, Johnny Cash Englebert Humperdink, or the Rare Earth,
The revolution will not be televised
The revolution will not be right back after a message, About a whitetornado, white lightning, or white people, You will not have to worry about a germ on your Bedroom a tiger in your tank, or the giant in your toilet bowl, The revolution will not go better with Coke, The revolution will not fight the germs that cause bad breath, The revolution WILL put you in the driver’s seat, The revolution will not be televised... WILL not be televised, WILL NOT BE TELEVISED, The revolution will be no re-run brothers,
The revolution will be live
Gil Scott-Heron
TEXTE // JE MONTE VERS MON PERE
Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin, alors qu’il fait encore sombre. Elle voit que la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis. »
Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau. Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il voit que le linceul est resté là ; cependant il n’entre pas. Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau, et il regarde le linceul resté là, et le linge qui avait recouvert la tête, non pas posé avec le linceul, mais roulé à part à sa place.
C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas vu que, d’après l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. Ensuite, les deux disciples retournèrent chez eux.
Marie Madeleine restait là dehors, à pleurer devant le tombeau. Elle se penche vers l’intérieur, tout en larmes, et, à l’endroit où le corps de Jésus avait été déposé, elle aperçoit deux anges vêtus de blanc, assis l’un à la tête et l’autre aux pieds. Ils lui demandent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur répond : « On a enlevé le Seigneur mon Maître, et je ne sais pas où on l’a mis. »
Tout en disant cela, elle se retourne et aperçoit Jésus qui était là, mais elle ne savait pas que c’était Jésus. Jésus lui demande : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Le prenant pour le gardien, elle lui répond : « Si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, et moi, j’irai le reprendre. »
Jésus lui dit alors : « Marie ! » Elle se tourne vers lui et lui dit : « Rabbouni ! » ce qui veut dire : « Maître » dans la langue des Juifs. Jésus reprend : « Cesse de me tenir, je ne suis pas encore monté vers le Père. Va plutôt trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »
Marie Madeleine s’en va donc annoncer aux disciples : « J’ai vu le Seigneur, et voilà ce qu’il m’a dit. »
Evangile de St-Jean
TEXTE // CONDITIONNEMENT
« Pour étouffer par avance toute révolte, il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées.
Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser.
On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté.
Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur. L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. »
Aldous Huxley
TEXTE // IGNORANCE
« Je condamne l’ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu’on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. J’ai souvent réfléchi à ce que pourrait être l’éducation de l’enfant. Je pense qu’il faudrait des études de base, très simples, où l’enfant apprendrait qu’il existe au sein de l’univers, sur une planète dont il devra plus tard ménager les ressources, qu’il dépend de l’air, de l’eau, de tous les êtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout détruire.
Il apprendrait que les hommes se sont entre-tués dans des guerres qui n’ont jamais fait que produire d’autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongèrement, de façon à flatter son orgueil.
On lui apprendrait assez du passé pour qu’il se sente relié aux hommes qui l’ont précédé, pour qu’il les admire là où ils méritent de l’être, sans s’en faire des idoles, non plus que du présent ou d’un hypothétique avenir.
On essaierait de le familiariser à la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaîtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposées aux enfants et aux très jeunes adolescents sous prétexte de biologie ; il apprendrait à donner les premiers soins aux blessés ; son éducation sexuelle comprendrait la présence à un accouchement, son éducation mentale la vue des grands malades et des morts.
On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en société est impossible, instruction que les écoles élémentaires et moyennes n’osent plus donner dans ce pays.
En matière de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celle du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d’avance certains odieux préjugés.
On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l’imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs.
Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses véritablement importantes plus tôt qu’on ne le fait. »
Marguerite Yourcenar
TEXTE // LIBERTE
« La liberté est un état d’esprit, non le fait d’être affranchi de quelque chose.
C’est un sens de liberté.
C’est la liberté de douter, de remettre tout en question.
C’est une liberté si intense, active, vigoureuse, qu’elle rejette toute forme de sujétion, d’esclavage, de conformisme, d’acceptation… »
Jiddu Krishnamurti